Il était tout juste sept heures ce mercredi matin lorsque une sonnerie a retenti dans mon appartement. Plongé dans un sommeil profond, il m’a fallu un certain temps pour comprendre qu’il s’agissait de celle de mon téléphone portable… Compte tenu de l’heure, j’aurais bien fait la sourde oreille mais voilà que l’intrus matinal était persévérant…


« Allo ! » (Un zeste énervé...)

(Tiens, voilà que ma sœur est tombée du lit et qu’elle m’appelle…)

 

-      « Tu as vu le temps qu’il fait… ? »

-      « Non… »
 
(Pour me parler de la météo à une heure pareille, elle a du péter un câble…)

-       « Oh putain… »

(Exclamation marseillaise indiquant la stupéfaction…)



Il neige à gros flocons et dehors c’est la panique…

 

Ma petite « sister » s’inquiète pour notre maman qui a rendez vous ce matin avec son  anesthésiste à la clinique de la résidence du Parc qui n’est qu’à trois cent mètres de son nid douillet… C’est vrai qu’avec sa prothèse de genou, elle n’a plus vraiment le pied « alpin » et qu’une chute pourrait être lourde de conséquences pour elle…

 

« Emballez, c’est pesé, je m’occupe de l’affaire…!»

 

Si le « médecin endormeur » est arrivé en 4x4, c’est loin d’être le cas de ses patients qui téléphonent les uns après les autres pour dire qu’ils sont en rade quelque part et qu’il leur est impossible de se rendre à leur rendez-vous… Une conséquence réjouissante pour les quelques courageux présents dans la salle d’attente du service…

 

Une demi-heure plus tard, la « mother » est de retour dans son « home sweet home » et je pars immédiatement en vadrouille, « pédibus-jambus » dans les rues de la ville qui est en proie à une gigantesque pagaille… Dix centimètres de neige ont suffi pour que les bus rentrent au dépôt quand ils l’ont pu et même, tramways et métros sont également aux abonnés absents…

 

Dans le quartier de Sainte-Marguerite, les voitures sont « en travers » quand elles ne se sont pas rentrées dedans, ce qui est un moyen aussi valable qu’un autre de faire des rencontres…

 

Les plus courageux ont décidé d’aller travailler à pieds et malgré tous ces contretemps, leurs visages affichent des sourires de grands enfants. Les plus petits font des boules de neige et les trottoirs de l’avenue du Prado se transforment en un immense terrain de jeu dévolu à la construction de bonhommes de neige…

 

Le boulevard Périer est méconnaissable. Compte tenu de sa forte pente, il est devenu impraticable dès les premières chutes de neige. Les conducteurs ont abandonné leurs véhicules qui sont stationnés un peu n’importe comment… Du côté du lycée Périer, un gros 4x4 a du intervenir pour tirer un bus du mauvais pas dans lequel il avait glissé…

 

Plus haut, je croise quelques skieurs et autres surfeurs qui descendent l’avenue comme une vulgaire piste de ski… En passant par la traverse Gagliardo, je me souviens que mon père m’avait dit qu’il l’avait dévalé sur une luge de fortune vers 1940

 

Depuis le sommet des escaliers du Boulevard Vauban, la vue sur  Notre Dame de la Garde est saisissante. La falaise du « bois sacré » a pris une couleur ocre très inhabituelle qui contraste avec la blancheur immaculée de la neige qui recouvre tout. Dans la colline, des branches de pins parasols n’ont pas résisté au poids de la neige et elles se sont écroulées sur les voitures qui étaient garées en dessous… Quelques toits de « boites à roues » sont cabossés… Mauvaise pioche !

 

On pourrait se croire n’importe où et certainement pas dans une pinède au centre d’une grande ville méditerranéenne. Soudain, le silence est rompu par les cris d’une mère de famille qui râle parce que ses bambins se roulent dans la neige… C’est consternant, alors je presse le pas avant d’avoir envie de conseiller aux enfants de l’enterrer sous une tonne de poudreuse…

 

Arrivé sous la basilique, je retrouve une foule de Marseillais (et de Japonais) qui sont montés depuis le vieux port pour profiter du spectacle. Les amateurs de sports de glisse sont au rendez-vous, suivis comme leur ombre par les photographes des différents « canards » et autres agences de presse présentes en ville.

 

Ceux qui ont fait l’effort de monter jusqu’ici en pensant faire brûler un cierge, l’ont…Dans l’os… ! Le Pont levis qui défend l’accès à l’édifice religieux qui vient d’être refait à neuf est relevé, sans doute parce que le cureton de service a eu peur qu’une bataille de boules de neige dégénère dans la crypte… !

 

Plus bas, dans le boulevard André Aune, un container de poubelles renversé et recouvert de neige s’est transformé en un tremplin de fortune qui fait la joie de quelques acrobates montés sur une planche de surf ou sur des skis. Depuis une fenêtre, une mémé crie que c’est interdit de faire di ski en ville et qu’elle va appeler la police, ce qui provoque l’hilarité générale… Il est clair que le « panier à salade » n’est pas près d’arriver jusqu’ici !

 

En descendant vers le cours d’Estienne d’Orves, les trottoirs sont de plus en plus glissants. Pour les personnes âgées qui ne sont plus très alertes, cela commence à vraiment sentir le « col du fémur », voire le « sapin »… J’observe avec délectation les glissades désespérées de jeunes femmes qui doivent regretter d’être perchées sur des chaussures à talons aiguilles. Un type qui s’est lancé dans une montée d’escalier alors qu’il marche péniblement avec des béquilles n’a pas perdu le sens de l’humour et il se demande si en cas de chute, il est préférable de se casser la même jambe ou s’il vaut mieux se péter l’autre…  Je le laisse à ses considérations hautement philosophiques et je poursuis mon chemin vers le port…

 

Les quais, les pontons, les bateaux, tout est recouvert de neige et la surface de la mer commence à geler… On pourrait s’attendre à trouver une colonie de pingouins mais il n’y a qu’une horde de badauds  aussi bruyants que des otaries qui tentent d’immortaliser le paysage avec leur téléphone portable… (Vous savez, cet engin diabolique qui sait tout faire sauf du café chaud…)

 

Les services de la voirie ont dû égarer la « salière » et certains passages sont particulièrement « casse-gueules », à moins qu’ils aient été laissés en l’état pour faire plaisir aux « Philippe Candeloro » en herbe… Sur la Canebière, Quelques voitures pataugent dans une bouillie noirâtre. La circulation est bloquée un peu plus loin et leurs conducteurs sont assurés d’avoir le temps de se demander s’il était très judicieux d’avoir sorti leur auto du garage dans de telles conditions météorologiques…

 

Le métro est parait-il opérationnel dans la partie en sous sol de la ligne 2 et je décide de l’emprunter depuis la station Noailles. Les aiguillages extérieurs ne fonctionnant pas, les rames sont réduites à faire des allers-retours sur le même rail et après un changement à Castellane, (alors qu’habituellement la ligne est directe), le terminus se fait au Rond Point du Prado… Les gens râlent et finissent par emprunter l’escalator de sortie qui a été mis hors-service par la neige qui s’y est engouffrée. De la glace s’est formée dans l’escalier métallique qui ressemble furieusement à un « piège à cons »

 


Compte tenu de la pagaille ambiante, Il est clair que la chasse aux « responsables » de tout et de n’importe quoi va être ouverte et je sens que je vais bien me marrer en regardant les informations à la télé…

 

Et je ne me suis pas trompé. Moins de 48 heures plus tard, voilà que François Fillon, le « Premier Sinistre » veut des explications et qu’il envoie une commission d’enquête à Marseille…

 

Certes, les dysfonctionnements ont du être nombreux mais cette nouvelle galéjade marseillaise est là pour rappeler que :

 L’homme ne peut rien contre la nature lorsque celle-ci a décidé de « s’emballer »…


*Si les photos vous intéressent, pensez à regarder les deux galeries "snowpark" et "snowmarseille" dans la colonne droite du blog...

Tag(s) : #tranches de vie...