Cet article écrit il y a plus de dix ans analyse des mécanismes qui permettent de détourner depuis des décennies  de l’argent qui aurait dû alimenter les caisses de l’état ou profiter à des handicapés et à des personnes en difficulté. Ceux qui ont développé ces pratiques ont trahi l’engagement qui était le leur. La diversité des fraudes pratiquées avec cynisme pendant de longues années montre qu’une grande lessive devrait être menée par les autorités compétentes et cet article est plus que jamais d'actualité.

 

Les associations sont à la mode… Elles se substituent à l’état qui, une fois de plus, montre son incapacité à gérer des problèmes cruciaux qui touchent des gens de modeste condition. Les téléthons, sidathons et autres grandes messes médiatiques fleurissent, prêchant la bonne parole et défendant ceux qui sont incapables de le faire…

 

Toutes ces initiatives altruistes jouissent d’une grande popularité et mobilisent des foules qui ne se rendent pas compte qu’elles sont habilement manipulées. Des expertises comptables démontrent que, bien souvent, plus de la moitié des sommes collectées sont englouties dans des frais de fonctionnement plus que discutables. Plus grave, certains escrocs ont carrément détourné des fonds et l’on se souvient encore d’un procès retentissant qui a touché un important organisme de recherche anticancéreuse.

 

Sans en arriver à ces extrémités, on ne peut que constater que ces importantes manifestations télévisuelles servent à la promotion d’animateurs, d’artistes qui sous le couvert du bénévolat soignent leur image de marque et l’ancrent dans un paysage médiatique qui fait feu de tout bois…

 

Mais il y a de fortes présomptions que les événements qui font la une des journaux ne soient que la partie émergée de l’iceberg. On peut soupçonner des personnalités locales d’avoir investi le milieu associatif dans l’unique but d’y être très influentes et d’y réaliser d’importants bénéfices. Les abus de bien sociaux sont certainement légions et il faudrait une véritable volonté politique pour que des enquêtes approfondies soient menées. Tout au plus, peut-on tirer les grandes lignes des techniques qui permettent à des personnes bien placées de tirer les cordons de bourses bien pleines à leur profit… ! Les plus habiles de ces délinquants sont des arrivistes qui ont pris le temps de se faire un nom et de s’asseoir dans un fauteuil avant de détenir les rênes du pouvoir.

 

Les méthodes d’enrichissement utilisées sont bien rodées et difficiles à prendre à défaut sans une enquête approfondie. Au début, les détournements ne sont pas spectaculaires et de ce fait ne sont guère décelables. Par contre, leur généralisation permet de réaliser des profits considérables qui constituent une véritable économie souterraine.

 

Les « petits avantages »…

 

Quand on est « Pape » de père en fils…. ! Ou plus simplement lorsque plusieurs représentants d’une même famille occupent les postes clefs d’un établissement sanitaire et social sous contrôle de l’état… ! Ce n’est certes pas interdit, mais peut-on considérer que dans de tels cas, l’égalité des chances devant un emploi public a été respectée ?  C’est encore plus choquant en période de chômage…

Plus grave, une simple enquête montrerait que certains postes nécessitant des diplômes précis sont occupés par des personnes qui ne les ont pas mais qui sont nées sous une bonne étoile. Filles, femmes, maîtresses, elles sont nombreuses à avoir été nommées à des postes qui n’auraient jamais dû leur être attribué ! Nous sommes loin de la « promotion canapé » et peut-on vraiment reprocher à un père d’avoir assuré l’avenir de ses enfants dans une période aussi difficile que la nôtre… ?

 

Il n’y a pas encore à proprement parler de « vol », mais dès lors, nous sommes sur la route de la corruption et du détournement…

 

Devenir « Calife à la place du Calife »…

 

Ou comment un chef de service deviendra Directeur puis Président…  C’est un travail, un investissement de longue haleine qui aura nécessité de laborieux travaux d’approches et de beaucoup de psychologie… A ce stade, les petits chefs ont évolué et tissé leur toile dans les sphères décisionnaires. Les conseils d’administration sont largement investis et les tentacules de la pieuvre vorace ne cessent de grandir. A ce stade, les « Grands Vizirs » « Iznogoud »» ont leurs antennes dans les conseils municipaux, généraux, dans les régions et plus généralement dans tous les lieux où les décisions importantes se prennent !

 

« Les petits détournements »…

 

Les centres sociaux ne sont pas des multinationales et les Directeurs ne pourront jamais « prétendre » à des salaires de P.D.G. du privé. Dans le milieu associatif, les bénéfices sont interdits, mais il n’est pas impossible d’en faire…. Sous réserve qu’ils soient réinvestis dans la création de nouveaux établissements…

 

Les salaires sont fixés selon une convention collective et les directions ne sont pas libres d’accorder des primes comme elles le souhaitent. Par contre, le fonctionnement peut rapidement s’avérer être une véritable mine d’or. Un véhicule de fonction est parfaitement autorisé et constitue un avantage financier non négligeable, surtout lorsqu’un comptable un peu trop curieux et zélé constate des consommations de 50L/100km avant de subir des menaces de licenciement… !

 

Les remboursements des repas sont la porte ouverte à des abus journaliers, d’autant plus que les commissaires aux comptes mettent rarement beaucoup de zèle à les vérifier…

 

Lorsque la camionnette qui alimente la cuisine d’un établissement a fait un détour tous les matins pendant plus de vingt ans par l’appartement de fonction d’un patron, on commence à se dire que décidément, il n’y a pas de « petits » profits et que les petits ruisseaux font les grandes rivières !

 

En comptabilité, il est très facile d’imputer certains achats personnels sur d’autres postes budgétaires ou d’autres chantiers. Rien de plus simple que de rajouter à une commande des matériaux superflus qui ne seront pas utilisés sur les chantiers pour lesquels ils ont été officiellement prévus.

 

Les déplacements dans la capitale sont fréquents pour les dirigeants provinciaux de ces établissements. Ils sont pris en charge par le budget des associations, mais on peut s’étonner qu’ils aient lieu très souvent les veilles de week-end et qu’ils soient accompagnés par leur épouse. Le shopping à Paris est devenu une espèce de sport pris en charge par les contribuables… !

 

Quand la fraude prend de l’ampleur…

Il est tentant et facile de faire acquérir par son établissement du matériel qui sera utilisé par le Directeur ou sa progéniture. Quoi de plus simple et d’économique que d’utiliser à domicile un ordinateur portable dernier cri payé par l’état et dont on aurait pu se passer, mais qui ravira ses enfants sans bourse délier…

Les Centre d’Aide par le Travail (CAT) sont de véritables sociétés qui emploient du personnel handicapé. Si, à l’origine, les CAT étaient des établissements sociaux, la rentabilité les a rattrapés et ils se sont transformés en entreprises commerciales qui se servent de véritables atouts pour devenir particulièrement compétitives.

Toutes sortes d’ateliers ont été créés et proposent leurs compétences dans de nombreux domaines. Certains centres emploient des jardiniers, des maçons, des menuisiers, des plombiers ou des électriciens encadrés par des moniteurs spécialistes de ces professions.

 

Les détournements de Main d’œuvre…

 

C’est une technique vieille comme le monde… Qui n’a jamais entendu parler d’un élu ou d’un cadre supérieur qui a employé une femme de ménage ou du personnel de maison payé par la mairie ou l’établissement qu’il a en charge. Ce petit personnel au statut souvent précaire n’a bien souvent même pas conscience d’être utilisé de manière illégale. De petits cadeaux ou des journées de congés supplémentaires permettent d’acheter un silence qui durera parfois des dizaines d’années…

Plus fort encore : certains n’ont pas hésité à faire rénover totalement leur villa par du personnel de l’entreprise sur son temps de travail salarié, donc au détriment des établissements. Lorsqu’une équipe travaille pendant plusieurs mois dans la résidence secondaire de son patron, le manque à gagner est double… Sauf exceptionnel concours de circonstances, ces travaux ne seront jamais facturés et le manque à gagner pour l’entreprise peut s’avérer colossal !

Lorsque « le temps » se gâte, suite à un banal contrôle d’URSSAF par exemple, l’employeur se fera rapidement facturer les matériaux à prix coûtant en omettant le coût de la main d’œuvre, les dépenses de repas des ouvriers, leurs frais de déplacement et d’hébergement engendrés par une longue période de travaux… En cas d’investigations plus poussées, il sera facile de plaider que ces travaux ont été faits dans le cadre d’un stage de formation permettant à des handicapés d’apprendre un métier…. !

 

Les échanges de « bons procédés »…

 

Le troc existe depuis la nuit des temps et peut parfois donner lieu à de très curieuses manœuvres… À ce stade, un nouveau palier est franchi par ceux qui ont acquis la certitude qu’ils sont intouchables… Ils considèrent le personnel comme LE leur et ils en usent abondamment.

 

Parfois, ces échanges se font entre les établissements sociaux eux-mêmes, ce qui peut paraître sans gravité. Il y a pourtant escroquerie à la TVA et c’est encore l’état qui est lésé. Mais ce peut-être également bien plus grave et devenir du vol qualifié. « Mon électricien se chargera des travaux à ta villa et tu m’envoies ton plombier… »  Le tout sans jamais de facture, bien entendu… !

 

Les associations « loi de 1901 » ne sont pas autorisées à réaliser des bénéfices et pourtant elles ne s’en privent pas… Toute l’astuce consiste à les réinvestir dans d’autres centres et de dépenser les excédents astucieusement… Certains sont passés maîtres dans l’art de rendre leurs structures populaires. La reconnaissance « d’utilité publique » est un gage d’honnêteté qui donne de la stature à une association… A une époque où « les affaires » se succèdent, certains dirigeants croient encore à leur impunité. Ils ont des amis influents partout et certains sont « Franc-Maçons ».

 

La machine est bien rodée, pourtant, leur excès de confiance finira par les perdre… D’autant plus qu’une prise de conscience est en train de se faire au sein des personnels. Certains comités d’entreprise grognent, mais sont encore muselés par un système bien pensé. Les rares courageux qui osent faire des remarques désobligeantes sont impitoyablement harcelés psychologiquement et contraints à la démission. Pour les plus tenaces, ils n’hésitent pas à monter de toutes pièces des licenciements pour faute lourde… Dans ce domaine, tous les coups sont permis, même les plus tordus !

 

Jusqu’à présent, toutes ces malversations n’ont pas intéressé la justice. Pourtant, des enquêtes mettraient rapidement en évidence que des millions d’euros ont disparu dans les poches de personnages hors de tous soupçons. Sans atteindre les montants dont on parle dans certaines affaires qui ont défrayé les chroniques, on peut s’attendre à faire de nombreuses découvertes propres à scandaliser l’opinion publique. Des malversations juteuses n’ont pas encore été mises à jour et sont autant d’épées de Damoclès au-dessus de la tête de certains notables qui ont des soucis à se faire.

 

Une seule question se pose :

Quel sera le premier domino à tomber et précipiter la chute de tout l’édifice ?