La scène se passait il y a déjà très longtemps à Komodo en Indonésie, à une époque où très peu de touristes osaient s’aventurer au pays des dragons. Il nous avait fallu louer un petit bateau local à Labuhanbajo et embarquer pour un périple sur une mer dangereuse où apparaissent subitement d’énormes tourbillons alors que le vent forcit subitement sans la moindre explication. Après avoir été passablement secoués, nous avions débarqué sur l’île où ne vivaient que quelques pêcheurs et des rangers à la sauce indonésienne, des quasi-déportés pour veiller sur les varans.

Après avoir signé le registre des voyageurs de passage, nous nous étions installés dans un bungalow sur pilotis offrant une  vue magnifique sur la baie. Au pied des escaliers, nous étions passés tout près d’une de ces bestioles semblant sorties tout droit de Jurassic Park. Elle se tenait parfaitement immobile, pouvant laisser croire qu’il ne s’agissait que d’un élément de décor taillé dans un tronc d’arbre… Le seul problème, c’est que depuis le balcon, nous avions pu voir ce gros « lézard amélioré » détaler vers la plage pour prendre un bain. Extinction des feux à 22h et interdiction de se promener la nuit dans le camp, au risque d’être pris pour un apéricube… !

La nuit avait été bruyante. Après un bon repas de poissons et de « cumi-cumi goreng », du poulpe frit, nous nous étions endormis très vite sous les moustiquaires, bercés par les murmures de la mer. Le calme n’avait pas duré longtemps. Des hurlements avaient commencé à retentir, suivis par les aboiements de chiens qui se répondaient dans le lointain et par toutes sortes de bruits indéfinissables. Puis le vacarme était devenu abominable… Quelque chose courait sur le toit et bientôt, nous avons compris que des rats de cocotiers ou d’autres rongeurs faisaient la fête dans les faux plafonds, les placages et même dans une armoire ! Cette sarabande  a duré jusqu’au chant du coq, du moins à ce qu’il parait, parce qu’en ce qui me concerne, comme d’habitude, j’ai dormi comme…. Un loir !

En prenant le petit-déjeuner sur le balcon ombragé, nous avons vu arriver une Jonque Chinoise et un autre navire sorti tout droit d’un film de pirates. Des chaloupes ont été mises à l’eau et chaque équipage a rejoint un côté différent de la plage. Soudain, nous avons vu les deux groupes fondre l’un vers l’autre en hurlant et un combat s’est engagé ! Médusés, nous avons observé cette scène incroyable sans oser bouger avant de comprendre qu’il s’agissait…. d’un tournage de film par la NHK !

En descendant sur la plage, je découvre les grosses caméras de télévision qui étaient invisibles à l’écart de la scène. « Selamat pagi » (bonjour), peine perdue, les cinéastes sont Japonais, les acteurs aussi et  les quelques Indonésiens ne sont que des figurants hilares. Alors que le soleil s’élève dans le ciel, la troupe s’affronte… au tir à la corde ! Il doit falloir être Japonais pour comprendre quelque chose à ce scénario qui n’a pas du bouleverser l’histoire du cinéma.

Cette compétition surréaliste à un tel endroit illustre parfaitement  la campagne présidentielle actuelle. Chaque candidat tente de tirer la couverture à soi et il n’y a plus de limites à la surenchère de promesses. Au lieu de se moquer ouvertement des électeurs, ils feraient mieux de commencer à prendre conscience que lorsque l’on tire trop sur une corde, elle finit par casser sans crier gare et que cela peut faire de gros dégâts. La Cécilia de Nicolas et le sigisbée de Ségolène seraient bien inspirés d’expliquer aux élus de leurs cœurs que de très graves complications peuvent survenir après une simple fracture du coccyx.

A l’instar d’autres activités « manuelles », la politique semble rendre sourd (e). En s’accrochant à leurs acquis comme des arapèdes à leur rocher, en refusant de se remettre en question, les élus creusent le fossé qui les sépare du peuple. L’embarquement pour le chaos aura-t-il lieu le 22 avril ?

Bien malin qui pourrait le dire, mais une chose est sure… le 23 c’est ma fête !

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